Le Domaine Montimbert, un grand blanc de Lavaux

Le pinot gris vinifié par Christin Rütsche est une grande réussite.

Berceau du chasselas, le Lavaux est une terre à vins blancs. Le pinot gris 2018 du Domaine Montimbert, à Chardonne, le rappelle avec éclat. Son nez est plein de promesses, avec des notes subtiles de fleurs blanches, de pomelo et de pierres mouillées. La bouche est à l’avenant, ciselée et charnue, avec un équilibre parfait entre matière et acidité. On retrouve des arômes d’agrumes, avec une belle finale salivante. Un vin superbe, idéal pour sublimer des asperges.

Le sang du Christ désacralisé

Pour célébrer l’Eucharistie, la plupart des églises choisissent du vin blanc légèrement doux acheté dans le commerce ou fourni par des vignerons locaux. Cette évolution marque une rupture avec la tradition d’un vin sacré  à l’étiquette dédiée  

Pas de messe ni de culte sans vin. Dès les premières célébrations de l’Eucharistie, le vin, « sang du Christ », était consacré et partagé entre les fidèles présents. Si la doctrine a évolué au cours des siècles, le rituel, lui, repose sur un socle immuable: le vin de la communion doit provenir de raisins fermentés sans ajout de sucre et sans aucun additif. Cette règle ne tolère aucune exception, comme l’a rappelé en juin 2017 la Congrégation romaine pour le culte divin et la discipline des sacrements dans une lettre circulaire adressée aux évêques. Publiée en français et dans sept autres langues, dont le latin, elle rappelait la « motivation théologique » de l’utilisation « de vin authentique ».

Du vin, du vrai, mais sans certification: l’Église fait confiance à ses ministres pour s’assurer de sa validité: il ne porte pas de label comme les produits casher (chez les juifs) ou halal (chez les musulmans). Tout vin de raisin pur convient pour cet usage. Les paroisses peuvent également librement choisir la couleur du vin: au fil du temps, le blanc a remplacé le rouge. Une option qui s’est imposée pour des raisons pratiques avant tout, selon Mgr Charles Morerod, évêque du diocèse de Genève, Lausanne et Fribourg: « On prend du blanc, et c’est souvent du vin doux parce qu’il se conserve mieux hors du frigo, une fois ouvert. » Autre argument souvent évoqué: le vin blanc a l’avantage de ne pas tâcher le linge  d’autel.

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Un pinot alémanique de référence

L’Argovien Tom Litwan produit des vins authentiques, à son image

Tom Litwan est venu à la vigne… par le vin. Comme le Grison Daniel Gantenbein ou le Tessinois Enrico Trapletti, devenus des stars du vin suisse après avoir exercé un autre métier, le vigneron argovien a suivi une formation de maçon avant de trouver sa voie. Le déclic? La découverte de pépites lors d’un séjour bourguignon. Dans la foulée, il commence un apprentissage de vigneron et part faire ses armes au bord du lac de Bienne puis à Genève, au Domaine des Balisiers.

Edmond Gasser, l’excellence faite sommelier

Nommé «Sommelier de l’année» 2020 par le GaultMillau, le Parisien impressionne par sa culture et son entregent. Rencontre autour d’un verre de vin

Edmond Gasser (Eddy Mottaz/Le Temps)

On lui avait demandé de choisir un vin pour accompagner l’entretien. Edmond Gasser a opté pour la cuvée Coò, du domaine Zündel, au Tessin. Un chardonnay tranchant à la finale iodée qu’il décrit avec précision après l’avoir rapidement pris en bouche. Ce choix résume très bien l’approche du vin de ce Parisien de 30 ans, nommé meilleur sommelier de Suisse 2020 par le GaultMillau: découvrir des vins à forte personnalité que l’on a du plaisir à boire et boire encore: «Je me pose toujours la même question: ce vin donne-t-il envie d’en reprendre un verre? Là, c’est le cas, n’est-ce pas?»

Edmond Gasser est ainsi: il n’assène pas, il questionne. Il n’impose rien, il propose avec tact, délicatesse et entregent. Ouvert à tout, il aime découvrir de nouvelles références. La curiosité est même une marque de fabrique, qu’il n’a pas perdue depuis sa nomination au poste de chef sommelier du restaurant Anne-Sophie Pic, au Beau-Rivage Palace de Lausanne, en janvier 2019. «Le risque, dans un palace, c’est de perdre la flamme, reconnaît-il. Des sommeliers blasés, il y en a des tonnes. Ils ne vibrent plus. Dans ces conditions, on est assez vite en roue libre. Je veux à tout prix l’éviter.»

Cuvée Milo 2018, Romain Cipolla

«Fais de ta vie un rêve et d’un rêve une réalité.» La citation de Saint-Exupéry donne tout de suite le ton sur la page d’accueil du site internet de Romain Cipolla: le jeune Fribourgeois exilé dans le Haut-Valais est animé par la passion du vin. C’est l’amour du divin nectar qui l’a poussé à s’inscrire à l’école de Changins pour devenir œnologue. Son diplôme en poche, ce vigneron sans terre est parti en stage chez Claudy Clavien, à Miège, puis chez Philippe Constantin, à Salquenen. C’est chez ce dernier qu’il a vinifié son premier millésime à son nom, en 2014, avant d’emménager dans ses propres locaux à Raron, en 2019…

Cristal Roederer, les secrets d’une cuvée iconique

Créé à la demande du tsar Alexandre II, le fameux champagne à la bouteille à fond plat a su s’adapter à son temps. Son maître de cave, Jean-Baptiste Lécaillon, en a fait la locomotive de la transition vers une viticulture biologique.

Avec son fond plat et son verre transparent, c’est une bouteille reconnaissable entre toutes. La relique d’un monde disparu qui a su se renouveler pour rebondir. Créée en 1876 à la demande expresse du tsar Alexandre II de Russie, la cuvée Cristal de la Maison Louis Roederer a failli disparaître après le bouleversement occasionné par la révolution d’octobre 1917. Elle est aujourd’hui une icône champenoise, à la pointe en matière de culture biologique dans une Champagne très en retard en la matière.

Au siège de Louis Roederer, à Reims, le lien avec la Russie est encore très présent. Installé sous un puits de lumière, un buste de marbre d’Alexandre II toise les visiteurs. Un hommage justifié pour un empereur qui offre à la marque une source intarissable d’anecdotes propices au storytelling. Ainsi, la fameuse bouteille en cristal – qui a donné son nom à la cuvée – aurait été conçue pour éviter qu’une bombe ne puisse prendre place dans le fond creux des flacons traditionnels.

Champagne, la vie en rose

La cote des bulles saumonées ne cesse de grimper, en particulier aux Etats-Unis, grâce à une nouvelle clientèle jeune et décomplexée. Une consécration pour une spécialité historique aux expressions très variées.

Le rosé a une cote d’enfer. Il représente aujourd’hui plus de 30% de la production de vin en France, contre à peine 10% il y a vingt ans. Cette croissance, dopée par le rosé de Provence, a atteint la très aristocratique Champagne. La part des champagnes rosés atteint 10% des exportations, contre à peine 3% il y a vingt ans. La croissance touche tous les pays, mais elle est particulièrement marquée outre-Atlantique. Aux Etats-Unis, deuxième pays importateur de champagne après le Royaume-Uni, le rosé représentait 17% de la consommation totale en 2018. Un succès qui s’explique par le développement d’une nouvelle clientèle, à la fois jeune, festive et argentée.

Le critique de vins, une subjectivité assumée

Bien choisir les vins pour les Fêtes est un art difficile, en particulier quand on n’y connaît rien. Le journaliste spécialisé joue le rôle de poisson-pilote, avec le plaisir comme principal moteur. Mon éclairage dans « Le Temps ».

Cela peut être un plaisir, mais c’est très souvent un casse-tête. Le choix des vins pour aborder la succession des apéritifs et repas de fin d’année fait l’objet de stratégies complexes: certains acheteurs cherchent des cuvées originales dans les rayons des commerces spécialisés, d’autres font leurs emplettes sur internet alors que la majorité fait son marché dans l’offre pléthorique de la grande distribution. Les critères de sélection sont divers et variés, avec des pondérations entre le niveau de prix, l’expérience personnelle, les médailles obtenues dans les concours, les préférences régionales ou encore la séduction d’une étiquette.

Dans ce marché extrêmement concurrentiel, le critique de vins joue le rôle de poisson-pilote. L’auteur de ces lignes – qui exerce cette fonction à temps partiel pour Le Temps depuis dix ans – goûte, évalue et recrache une centaine de vins par mois. Contrairement au critique de cinéma, qui écrit sur tous les films qu’il va voir, le journaliste du vin est extrêmement sélectif: il ne chronique que ses coups de cœur et encore, pas tous.

Petite arvine Les Clives 2018, Cave Caloz

Le domaine familial de Miège est l’une des locomotives de la viticulture biologique.

A la Cave Caloz, à Miège, on cultive plusieurs sillons en parallèle. La vigne, bien sûr, dans le respect de la nature: le domaine, certifié Bio Suisse, a obtenu en 2019 le titre de cave suisse bio de l’année. L’esprit de famille, ensuite: Conrad et Anne-Carole Caloz ont été rejoints en 2013 par Sandrine, l’aînée de leurs quatre filles, diplômée en œnologie à Changins. Un fort engagement social, enfin, nourri par de profondes convictions catholiques: la maison familiale accueille régulièrement des migrants et des personnes en situation de handicap avec le souci constant «de mettre l’humain au centre».

Cornalin «Neyrun» 2016, Lux Vina

La cuvée spéciale du duo Z’Brun-Gfeller a placé la barre très haut dès son premier millésime

Les vignerons suisses sont de plus en plus nombreux à créer des cuvées à forte valeur ajoutée, issues de leurs meilleures parcelles ou de vinifications spéciales. Il est plus rare qu’ils créent une gamme complète qui se démarque de leur production habituelle. C’est le défi que se sont lancé Patrick Z’Brun, propriétaire des domaines des Chevaliers, à Salquenen, et son œnologue Christian Gfeller. En 2017, les deux hommes ont mis sur le marché six vins estampillés Lux Vina, Lux étant le prénom de la mère de Patrick. En avril 2018, ils ont été rejoints par le cornalin Neyrun, nom historique du cépage valaisan.